" Sur le Sable " - Les fantômes ne meurent jamais...

" Sur le Sable " Michèle LESBRE

" J'ai soudain vu les flammes au dessus de la dune que je longeais depuis un moment. Elles s'étiraient sur le ciel sombre, ne laissant rien apercevoir de ce qu'elle dévoraient avec un ardeur sauvage. j'ignorais où je me trouvais exactement, depuis plus d'une heure je roulais au hasard. J'étais sans doute près de l'une de ces plages où je n'étais pas encore allée, trop éloignées de mes itinéraires routiniers dans cet endroits provisoire. Depuis que j'avais quitté Paris, je n'étais plus chez moi, nulle part. De toute façon, je ne voulais plus être chez moi."

Ce roman je l'ai lu d'une traite, comme enlisée dans cette dune de sable, comme enlisée dans des souvenirs, comme cabossée par la vie. Ce roman, c'est une "chanson douce", un air mélancolique, un rideau qui tombe, un rayon lumineux qui illumine une journée de pluie. C'est beau comme un coucher de soleil sur la mer, aérien et fragile comme une feuille qui tombe, chantant comme une ritournelle de jadis. C'est le tourbillon de la vie, l'explosion de nos coeurs. "Des étincelles jaillissaient de la fournaise et s'évanouissaient tout aussitôt dans leur envol. Une lumière sanguine inondait peu à peu le ciel, c'était magnifique"

Mais comment vous raconter cette histoire, ce roman sans le dénaturer ? Comment vous donner l'envie de commencer ce livre ? Pour vous dire la vérité, il m'est difficile de vous en parler, de vous le raconter. Car oui, c'est toujours important de raconter un livre, de donner envie à celui qui ne l'a pas encore entre ses mains de vouloir l'ouvrir, le lire, le savourer. " Les rôles sont parfois mal distribués, c'est sans doute ce qui provoque bien des malentendus."

C'est donc l'histoire d'une rencontre improbable, mystérieuse entre un homme et une femme, d'une rencontre au bord d'un océan, d'un coucher de soleil, de vagues emportant les âmes errantes, d'une maison qui prend feu, d'une pente douce. C'est l'histoire de deux amours aux destins cruels, de tempêtes intimes, de fantômes se rappelant à leurs mémoires. C'est l'histoire d'une rencontre, une rencontre tout simplement.

" Mais il s'est levé, s'est approché et m'a dit sur un ton de confidence. Ce n'est rien c'est ma petite guerre, c'est fini, j'en suis venu à bout, venez vous asseoir". "Je me suis assise sans oser lui faire face et j'ai attendu". "Le monde devenait flou et de ce fait beaucoup plus fréquentable". "Le temps était venu, me semblait-il, de tout bouleverser, de brouiller les pistes, de passer ici et là, toujours ailleurs, de liquider tout le fatras encombrant qui ne parlait plus de moi, de moins en moins en tout cas. Vieux objets, vieux souvenirs figés dans un décor immuable qui me donnait la nausée et dont je tentais de me débarrasser."

Quoi qu'il se passe, ces deux êtres restent là sur cette plage... Mystère, partage, écoute, chemin de vie, Bologne. Bologne : l'amour, l'attentat, l'explosion, la mort. " J'entendais les cris des femmes à genoux qui suppliaient qu'on laisse leurs hommes en vie, la détonation de la bombe dans la salle d'attente de la gare de Bologne et les hurlements de la ferraille qui jaillissait et broyait les corps ". Réalité ou fiction... comme les personnages des romans de Mondiano que cette femme habite. Mondiano, fil conducteur si fragile de cette histoire : "les livres pouvaient-ils prendre le pouvoir sur nos existences, les faires ressembler à ce qu'ils laissent en nous, des traces indélébiles parfois ? ".

Michèle Lesbre a cette capacité de nous emmener en voyage. C'est d'un charme fou, c'est une écriture simple, ciselé, limpide. C'est d'une infinie douceur, d'une infinie tendresse, d'une sensibilité, d'une générosité littéraire, mélancolique et si lumineux, quelque chose qui ressemble à un vague espoir.

"Sur le sable " est à retrouver chez Mirontaine, qui en parle divinement bien.