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Le blog du petit carré jaune
28 août 2015

"Achille" Marie Richeux

achille

" Ton nom est une armée, mille soldats contenus dans ton nom, mille armures contenues dans ton nom, mille chars, dix mille chevaux, écoute comme ton nom fait du bruit. C'est charmée par cela que ma porte c'est ouverte. J'aurais dû mieux entendre."

Marie Richeux, c'est tout d'abord une voix qui nous parle, qui nous susure des histoires polaroïds, des petits riens qui deviennent de belles et douces lumières, des historettes, des clichés de mots qui font du bien. Par l'intermédiaire des ondes, elle s'invite dans nos salons, nos oreilles, s'y installe et nous narre une image qui vient de loin ou de près, mais dans tous les cas qui vient du coeur, des yeux et de l'âme. Une histoire bien à elle, un "Polaroïds" de mots, un odyssé de sons, de couleurs, de vie, une âme tranquille qui avance avec son temps, sans bruit, sans force avec douceur et humanité.

Je l'ai bien sûr découverte par l'intermédiaire de son émission sur France Culture. Je la suis... pas fidélement je le reconnais mais je la suis. J'aime y revenir, l'entendre de sa voix douce. L'entendre comme Pénélope attendait son Ulysse et racontait des histoires en observant son retour. J'aime sa voix, j'aime ses couleurs, j'aime ce qu'elle me raconte.
Alors lorsque ses Polaroïds sont sortis chez Sabine Wespeiser éditeur en 2013, j'ai aimé la retrouver et lire ce qu'elle m'avait raconté. Et j'aime toujours autant d'ailleurs. Il m'arrive souvent de le rouvrir, de parcourir ses mots, ses tendres songes d'une nuit d'été ou d'un jour à la beauté fragile et gracile. J'aime oui.

 

"C'est une course lente et immobile qui prend son origine dans la grotte et trouve sa fin dans la grotte. C'est une course où l'on observe précisemment les muscles se contracter et se défaire. Une course muette où les cris, les chants, les souffles retors sont etouffés, inscrits et invisibles. C'est une course que tout le monde feint d'ignorer une fois qu'il l'a vue, mais revient en cauchemar, en hallucinations quand le jour est haut. C'est une course au ralenti."

 

Ce coup-ci, Marie Richeux s'est attaquée à un mythe. Le mythe du plus grand des héros grecs de la mythologie. Celui qui a été chanté par Homère dans l'Iliade. Celui qui a fait de son talon, la plus grande des légendes, traversant les siècles et les enseignements. Une légende qui a tellement été contée, enrichie, qu'on ne sait plus qui est le véritable Achille, qui est derrière ce mythe. Alors s'attaquer à une telle histoire, s'attaquer au héros... Il fallait être Marie Richeux pour oser, oser faire d'un héros, une homme aux fragilités multiples, au caractère ombrageux et excessif, au coeur brisé par tant de guerres livrées en lui et hors lui. Il fallait oui, une conteuse, une passeuse de mots, une femme qui ose rencontrer l'homme en face à face, qui ose braver l'oracle et Thétis, s'emparer d'une légende et en écrire une autre page, un roman poignant, ensorceleur, délicat, poétique, moderne.

La rencontre s'opère dans son salon. Le salon de son appartement, cette pièce où quand la nuit tombe, elle consulte son ordinateur. Au cours de cette nuit, en contemplant une image de Thétis, Achille débarque et s'invite dans son salon. En tenue de guerrier, casqué et armé, il se pose sur le bord du canapé, déambule dans le couloir, se confie à Marie. Et c'est un autre Achille que nous rencontrons. Un Achille qui a du se battre d'abord contre sa propre enfance, sa naissance. Un Achille qui a échappé à la mort dès son premier cri, un cri de guerre contre le feu qui lui brulait le corps, contre cette grotte qui était son tombeau-lieu de renaissance-enfer aux portes du Styx. Vulnérable malgré l'immortalité voulue par Thétis, sa mère aimante et si ombrageuse.

"Je savais que je mourrais à Troie, mais je n'avais peur de rien ! J'avançais, en tuant le sable, en tuant les troupes, le vent de sable, le souffle des hommes. J'étais un massacre ambulant, peur de rien, même l'oracle, je le défiais intérieurement. Je savais que je mourrais, mais me vivais invincible."

C'est ce prénom que prononce Marie Richeux. Ce prénom où règne le sang, les armées, les tueurs et autres assassins de l'Iliade. C'est ce prénom qui fait revenir les images de massacres troyens, la foule, le bruit, un bruit "qui avance et dont je ne peux me défaire, un bruit qui aimante, et m'effraie. Un bruit que je voudrais ne pas aimer, mais ce sont les sabots déchainés des chevaux contenus dans ton nom, contenus par l'amée qui m'attirent. [...] Il y a ce son, qui est un bruit, qui est un nom dans un nom et me foudroie, comme me foudroie la façon dont on te nomme."

C'est ce nom qui va faire que Marie richeux va réécrire le mythe qui va déméler les fils qu unissent Thétis à Achille, qui va détricoter tous cette trame pour en refaire un canevas moderne, accepter de faire de cet héros au courage, un homme beaucoup plus fragile, pleurant sur son enfance, sur sa mère, son père, Pelée. Le héros anti-héros.

C'est à un dialogue tirangulaire venant de la mythologie que nous convie Marie Richeux. Une audacieuse et poétique recnontre, une trame tissée contemporaine. Une destruction d'un mythe, la naissance d'un homme.

 

Achille
Marie Richeux
Sabine Wespieser éditeur

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