9782211036931

Certains livres sont conservés précieusement dans les bibliothèques comme pour mieux être ressortis lorsque le cœur le ressent, lorsque l’oreille traine sur les ondes radiophoniques et capte une émission qui redonne illico presto l’envie de relire ces mots qui ont caressé le regard et pénétré le cœur, l’âme.

Et lire Susie Morgenstern est juste cela. 

Lire Susie Morgenstern c’est replonger dans ces mots qui nous réveillent, nous donnent le sourire, nous procurent l’envie de rire un peu plus fort, de chanter à plein poumons, de prendre la main de l’amoureux, de l’enfant qui est en nous et de lui rappeler de balancer ses pieds dans les premières flaques d’eau croisées.  
Susie Morgenstern, c’est l’oxygène, les amours, l’amour, la vie. C’est la jubilation des mots, la tendresse des écrits, la douceur de l’amour, de l’humain. C’est la bonté, la générosité des sentiments, la captation des émotions, la palpation des cœurs qui chavirent.  

« Ce cœur endormi qui se mit à s’étirer, ce cœur taciturne qui se mit  rigoler, ce cœur aphone qui émit de nouveaux sons, ce cœur posé qui posa des questions, ce cœur était désormais lié par un fil presque visible à sa voisine victorieuse, impérieuse, impétueuse et très, très rieuse. »

Oui lire Susie Morgenstern est comme prendre une grande bouffée de vie en soi, retrouver avec amour sa prime jeunesse, réentendre les mots contés, susurrés. Et « Lettres d’amour de 0 à 10 ans » est juste cela. Une grande bouffée de tendresse que l’on s’adresse, une grande ode à la vie et à sa précieuse rareté 

De ce petit roman jeunesse redécouvert un après midi, j’ai écrit des mots et des mots sur un carnet, rempli des pages blanches d’une encre bleue un peu délavée et enterré à l’ombre du noisetier les os que je rongeais depuis quelques temps. J’ai lavé à grandes eaux ce ciel qui m’obstruait et ressorti la beauté, pas celle de l’extérieur, non, celle là elle est quelconque, « pas importante », mais celle qui vient du cœur. J’ai ressorti ces lettres, ces voyelles et consommes liées par une ficelle et ai écrit ce texte que vous lisez. Oui Susie Morgenstern m’a inspirée.  

Il faut dire qu’à chaque page que je feuilletais de « Lettres d’amour de 0 à 10 ans », le sourire se glissait sur mes lèvres. L’odeur de naphtaline qui embaumer les premières pages, laissait place à ce bol d’air nécessaire aux poumons, au cœur, l’âme pour vivre. Tout vibrait en moi.
Je suis partie de ce constat « Plus la peine est profonde, moins on peut la dire ». Et j’ai ouvert la porte en faisant bien attention de ne pas perdre la clef qui l’avait entrebâillée. L’énergie renaissait comme l’appétit, en mangeant. Tout devenait précieux. Le stylo courait sur la feuille de gauche à droite pour effectuer un virage à quatre vingt dix degrés lorsqu’il arrivait au bout de la ligne. Par vagues, les mots échafaudaient un texte, les virgules dansaient et les points marquaient des suspensions, comme les pas suspendus des danseuses en tutus. J’étais aux anges. 

« Le jour où on efface un jamais est un grand jour. Le jour où on efface au moins trois jamais pour mettre en place des premières fois est triplement grand. »

Voilà ce que me rappelait Susie Morgenstern par la voix d’Ernest, le héros de son histoire. Je m’enivrais de sa lumière, de cette chaleur qui se propageait en moi. L’enfant renaissait. Les larmes ressemblaient à des sillons de vie, la colère s’estompait, le sourire était là, bien implanté sur mes lèvres. Et j’ai eu envie de manger un couscous, parce que le couscous c’est tout cela, les pierres de la vie et les piments du bonheur.
Mais chaque mot devait se poser doucement, en son temps, lettre par lettre, voyelle après consomme. 

Une rencontre littéraire venait de s’opérer en moi. Susie (j'étais devenue amie avec elle) me déshabillait lettre par lettre, page par page et j’aimais ça. J’aimais qu'elle me prenne la main, m’emmène sur des chemins que j’avais déjà connus, foulé. J’aimais qu’elle me rappelle la beauté des choses, la générosité des êtres, la bonté et la confiance en l’autre. J’aimais qu’elle me rappelle que notre monde n’était pas que peuplé d’obscures êtres qui nous procurent des jours brumeux, des ciels bas. J’aimais qu’elle me force à regarder la vie par l’autre bout de la ligne, changer ma focale, zoomer sur cette tendresse que j’avais oublié. C’était délicieux. Délicieux oui. Tout simplement. Et bien meilleur que tous ces livres de psychologie, de bien-être et sérénité qui fleurissaient dans une danse commerciale. 

Car Susie Morgenstern venait de me rappeler que la vie devait être épicée, joyeuse, saugrenue, irrévérencieuse parfois mais toujours belle, espiègle, vraie, sensible comme une feuille de papier à remplir. Et surtout elle devait être « au moins quatre fois meilleur ». Quatre fois meilleur pour jouir de vivre, d’aimer et d’écrire d’autres lettres d’amour de 0 à 10 ans. 

 

(et filer lire le billet écrit par Emilia et Jean sur son dernier ouvrage " Jacques a dit " que je vais m'empresser d'aller acheter)

 

Lettres d’amour de 0 à 10 ans
Susie Morgenstern
Neuf
L’école des loisirs.

 

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Boubat