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Le blog du petit carré jaune
24 juin 2018

Marion Collé - Etre fil

 

Être-fil_300dpi-790x1024

Etre fil, jongler sur son équilibre, trouver la prise qui gardera à plat le pied, traversera le vide, enterrera les peurs et craintes. Etre fil et ressentir les vibrations du corps, des mots, du fragile point d’équilibre, grandir, s’aventurer, s’hasarder dans le temps qui se déroule, enfle, s’éternise, se recueille.
Etre fil et murmurer, fragile objet que nous sommes, spectacle de notre âme à jamais résorbée. Chercher les mots et les filets, se rattraper dans les sanglots étouffés, le feuillage tapis de sol, les ponts, les arches, les fourrés et s’enflammer comme une torche, dans l’errance d’une piste, d’une nuit, d’un jour, quasi mort à la recherche d’un abime, d’un visage perdu dans le vide.

Etre fil et avancer à travers l’indicible, le silence solitaire, en enroulant la corde autour de la main, rêne de sa vie, traversant les paysages offerts. Ressentir les mots comme une odyssée, un souvenir, un reflet, un chemin à jamais cheminer, évanouir sous la trace du pas fait de côté. Etre filet s’écarter, se rendre invisible, partir, s’absenter, s’évanouir dans le paysage, aveugle, sans appui ni équilibre, sans roseau ou bribe. 

« Combien de traversée face au vide ? »

Evider les ombres, les effrois, les peurs et regrets. Ressentir les failles, les pentes, les déserts, les ciels bas, l’épuisement. Etre fil et se renverser, s’enterrer, ne plus savoir les dimensions, l’espace, la distance. Etre partout, sans bruit, ni fracas, au fond de soi, au fond du monde. Nettoyer la place, retrouver sa place, fragile sentiment d’abandon, fragile sentiment de déséquilibre et questionnement, des heurts et des chutes.

« Couper les mots
en blocs solitaires
tailler les phrases
par paires
attaquer le continent
des sons et des rimes
retrouver le rythme
le sens et l’odeur
de l’encre liquide. »

Etre fil et ressentir chaque mouvement, ondulation du corps à s’en brûler, s’enflammer, s’écarteler. Vaciller comme la flamme, le corps, l’âme, les paupières et yeux clos. Oser un pas, un pied, dans le présent et la réalité. Gratter les plaies, s’arracher du sol, s’éloigner de la piste, toucher les étoiles, la cire du verbe. Rependre racine, sentir le souffle, la mer, les couleurs pour alliés, la matière pour filet. Respirer et traverser.

« L’infinie réflexion
de mon désir d’amour.
Je m’accorde […]
Je zone
Si je me précipite
Les vrais sentiments vont fuir. […]
J’ai peur de l’espace troué
J’ai peur que l’espace me troue
J’ai peur de trouer l’espace.
Trou ! »

Le corps s’ouvre et la traversée se fait. Encore. Toujours. Boucle répétitive et infinie. Traversée  comme une vague, marée. Dans le tumulte et le silence, le bruit et la ouate. Sauver l’intégralité du bleu et des couleurs, le soleil et ses reflets. Recueillir le précieux, nectar du temps et des souvenirs.

« JE SAUVE
LA BEAUTE, LE SENSIBLE
JE REJETTE L’EPOQUE
JE REJETTE LE NOIR
JE REJETTE LA MORT
JE GARDE L’ESPOIR COMME CIBLE
ET JE SAUVE AUSSI AU CREUX DU ROC
- FAILLES ET FISSURES
- BOURRASQUES ET TEMPETES
TOUS LES VENTS QUI TRAVERSENT
LE CORPS ET LA TETE
JE SAUVE LES COULEURS DANS L’ANGOISSE
LE DESIR DANS L’IMPASSE
LA MUSIQUE
LA LUMIERE
LA PRESENCE DU BONHEUR
CACHE EN PROFONDEUR »


Et découvrir les mots de Marion Collé un jour de grand vent. Se sentir fil, se sentir vibrée, funambule fragile sur la portée. 

 

 

Etre fil
Marion Collé
Editions Bruno Doucey

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Commentaires
B
C'est très beau. Merci pour cette découverte.
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